DE LA PROPAGANDE EN PHASE TERMINALE
Les
images produites par le "moment covid" ont ceci de déroutant qu'elles
superposent, en des proportions variables et de manière plus ou moins
intriquée, trois degrés de propagande.
Le
premier degré de la propagande, vieux comme l'Histoire, consiste à
faire passer un mensonge pour une vérité. "Le covid est une pandémie
très grave : tous vaccinés, tous protégés". Cette propagande ne revêt
qu'une perversité très limitée car elle est sous la vigilance permanente
du réel : un premier ministre "contaminé par sa fille" alors qu'il
avait présenté la double-injection comme un sésame d'immunité, un
ministre de la santé à l'isolement après que toute la gérontocratie
sénatoriale a bénéficié de ses augustes postillons.
Le
deuxième degré de la propagande, très bien décrit par Hannah Arendt, a
été illustré par les totalitarismes du XXème siècle. Il consiste à
contourner les aléas du consentement en suscitant, par une pratique du
mensonge suffisamment permanente et intensive, l'incapacité de croire en
quoi que ce soit. Ce sont des empilements d'arguments absurdes et
d'injonctions contradictoires : "Le vaccin protège les personnes
fragiles des formes graves mais pas de la transmission, donc il faut
vacciner les enfants parce qu'ils peuvent transmettre le virus à leurs
grands-parents quand ils boivent leur café debout." Ce sont des
lapalissades érigées en démonstrations scientifiques pour mieux
détourner l'attention d'une vérité gênante : "chez les vaccinés, le
risque de formes graves est lié à l'âge ou aux comorbidités, selon une
vaste étude" (Le Figaro, 11 février 2022). Désorientée comme une
chauve-souris dans un faisceau d'ultrasons, notre intelligence se
recroqueville sur elle-même et renonce à lire le réel.
Le
troisième degré de la propagande consiste à mettre en scène le
consentement à l'humiliation de ceux dont on est supposé obtenir
l'obéissance. L'efficacité du récit sur son destinataire ne se vérifie
plus à sa capacité de faire passer le faux pour le vrai, ni à le
désensibiliser au contact de l'absurde, mais à devenir la propre
conscience tétanisée de sa déchéance, la forme ordinairement dégradée de
son rapport au monde. L'adhésion consciente à la propagande en tant que
propagande est recherchée, vécue et valorisée comme condition de survie
de l'ordre social. Dès lors, le destinataire de la propagande signifie,
par son seul silence, l'évidence indicible de son triomphe. Si
toutefois il lui passait par l'esprit l'étrange idée de vouloir parler,
la mise en évidence des mécanismes de propagande ne servirait plus à
rien puisque la nudité du roi s'est communiquée à la foule toute
entière. La voix innocente de l'enfant, qui résonne dans le conte comme
le chemin du retour au réel, serait vécue comme un dévoilement du
dévoilement dont le ridicule nous figerait à l'instant dans les raideurs
de la mort.
En
cet instant où s'apprête à être proclamée parodiquement la "victoire
sur la pandémie", voici l'éclat de la vérité devenu le principal
obstacle à sa manifestation.
Source des illustrations : campagne de l'ARS Pays-de-la-Loire, 4 février 2022 / campagne des "Jeunes avec Macron", février 2022.
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