samedi 12 février 2022

DE LA PROPAGANDE EN PHASE TERMINALE

Les images produites par le "moment covid" ont ceci de déroutant qu'elles superposent, en des proportions variables et de manière plus ou moins intriquée, trois degrés de propagande.

Le premier degré de la propagande, vieux comme l'Histoire, consiste à faire passer un mensonge pour une vérité. "Le covid est une pandémie très grave : tous vaccinés, tous protégés". Cette propagande ne revêt qu'une perversité très limitée car elle est sous la vigilance permanente du réel : un premier ministre "contaminé par sa fille" alors qu'il avait présenté la double-injection comme un sésame d'immunité, un ministre de la santé à l'isolement après que toute la gérontocratie sénatoriale a bénéficié de ses augustes postillons.

Le deuxième degré de la propagande, très bien décrit par Hannah Arendt, a été illustré par les totalitarismes du XXème siècle. Il consiste à contourner les aléas du consentement en suscitant, par une pratique du mensonge suffisamment permanente et intensive, l'incapacité de croire en quoi que ce soit. Ce sont des empilements d'arguments absurdes et d'injonctions contradictoires : "Le vaccin protège les personnes fragiles des formes graves mais pas de la transmission, donc il faut vacciner les enfants parce qu'ils peuvent transmettre le virus à leurs grands-parents quand ils boivent leur café debout." Ce sont des lapalissades érigées en démonstrations scientifiques pour mieux détourner l'attention d'une vérité gênante : "chez les vaccinés, le risque de formes graves est lié à l'âge ou aux comorbidités, selon une vaste étude" (Le Figaro, 11 février 2022). Désorientée comme une chauve-souris dans un faisceau d'ultrasons, notre intelligence se recroqueville sur elle-même et renonce à lire le réel.

Le troisième degré de la propagande consiste à mettre en scène le consentement à l'humiliation de ceux dont on est supposé obtenir l'obéissance. L'efficacité du récit sur son destinataire ne se vérifie plus à sa capacité de faire passer le faux pour le vrai, ni à le désensibiliser au contact de l'absurde, mais à devenir la propre conscience tétanisée de sa déchéance, la forme ordinairement dégradée de son rapport au monde. L'adhésion consciente à la propagande en tant que propagande est recherchée, vécue et valorisée comme condition de survie de l'ordre social. Dès lors, le destinataire de la propagande signifie, par son seul silence, l'évidence indicible de son triomphe. Si toutefois il lui passait par l'esprit l'étrange idée de vouloir parler, la mise en évidence des mécanismes de propagande ne servirait plus à rien puisque la nudité du roi s'est communiquée à la foule toute entière. La voix innocente de l'enfant, qui résonne dans le conte comme le chemin du retour au réel, serait vécue comme un dévoilement du dévoilement dont le ridicule nous figerait à l'instant dans les raideurs de la mort.

En cet instant où s'apprête à être proclamée parodiquement la "victoire sur la pandémie", voici l'éclat de la vérité devenu le principal obstacle à sa manifestation.

Source des illustrations : campagne de l'ARS Pays-de-la-Loire, 4 février 2022 / campagne des "Jeunes avec Macron", février 2022.
 
 






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