LETTRE OUVERTE AU MAIRE DE BÉZIERS
Mon cher Robert,
Depuis deux ans, tu ne cesses de te répandre en protestations frénétiques de tes nouvelles fidélités : à Pfizer, à Macron, à l'OTAN, à la Commission européenne.
Et maintenant, comme tu as besoin des réfugiés ukrainiens pour soutenir ton projet de "Neuordnung Europas", tu t'es dit que tes propos sur les Syriens "faisaient tâche".
Alors tu as demandé "pardon". A David Pujadas !
Quelques uns s'en réjouissent. Ils disent que tu as "changé". Ta "sincérité" les émerveille. D'autres s'en offusquent. Ils se demandent de combien de doublures ta veste est équipée pour pouvoir la retourner aussi vite.
Mais non, Robert, c'est beaucoup plus grave que ça. Tu es ce que tu as toujours été depuis "Reporters sans frontière" jusqu'à la droite du FN : le BHL du pauvre.
C'est un drôle de chassé-croisé. Tandis que tu te contentes de réaffirmer tes premières amours néoconservatrices et américanolâtres, ce sont tes nouveaux amis, ceux qui font semblant de croire que tu a changé, qui se chargent de proclamer urbi et orbi ce que tu affectes de regretter maintenant - ce profond mépris pour les réfugiés syriens dont, naguère, ils célébraient l'accueil. Car eux et toi ne savez ni aimer, ni haïr : vous ne savez que mépriser. Vos charités de dame patronnesse ne valent pas mieux que vos répulsions. Elles sont superposables.
Au fond, ton rapport à l'extrême-droite est le même que celui de De Gaulle à l'OAS - tu te doutes bien que je ne choisis pas cette comparaison par hasard. Pendant que certains, s'illusionnant sur leurs propres fantasmes, basculaient dans la folie, toi, lui, confondant la France avec l'ordre, ont compris ce qu'il fallait changer pour que rien ne change. Cyniquement. Froidement. Et malheur aux harkis, à ceux d'hier comme à ceux d'aujourd'hui. Peu importe au fond qu'on les déteste ou qu'on s'en serve : ce ne sont pas des "comme nous". Ils n'ont pas les mêmes bagnoles. Ils n'ont pas les mêmes loisirs. Peut-être même qu'ils ne regardent pas Jean-Pierre Pernaut.
Tu es l'expression anthropologique achevée du "en même temps macronien", de cet extrême-centre auquel tu as toujours appartenu et qui considère la misère humaine comme une variable d'ajustement de l'ordre social. Ton pathos de sous-préfecture épouse les variations d'humeur de ta clientèle électorale, toujours en quête d'une cause à défendre pour maquiller sa sainte terreur de l'inflation, mais il sert toujours les mêmes maîtres, ceux dont le pouvoir ne repose que sur la division et sur la manipulation.Tu es un petit-bourgeois qui veut continuer de régner sur ses ruines et qui sait très bien de qui il faut continuer à mendier la protection. Tu serais prêt, s'il le fallait, à renier ton père et ta mère.
Tu n'as pas changé, Robert. Tu es de plus en plus le même. De plus en plus toi. De pire en pire.
C'est pourquoi, contrairement à ce que disent tes amis de Charlie : non, Robert, "tout n'est pas pardonné".
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