FAIRE SILENCE
FAIRE SILENCE
Il est aussi réducteur de prendre une manifestation de routiers au Canada pour une nouvelle Pentecôte que d'en faire une forgerie sociale bricolée par Elon Musk.
Ces deux postures, que je vois fleurir un peu partout sur mon "fil d'actualité", sont l'expression d'une eschatologie mal comprise qui nous situe en surplomb des événements et nous permet de les observer en spectateurs.
Elles dissimulent, chacune à leur manière, une aspiration conservatrice. Les uns espèrent qu'une cause extérieure leur ramènera "la vie d'avant", les autres se donnent un prétexte pour ne jamais passer à l'action. Cependant, ni les uns ni les autres ne voient plus la réalité. Nous n'observons plus rien d'autre que nos propres observations se reflétant dans les observations d'autrui.
En vérité, des forces énormes sont à l’œuvre qui nous dépassent et qui nous traversent intérieurement. L'issue de ces mouvements tectoniques dépendra des rapports de nécessité que chacun d'entre nous, en raison de sa position sociale, entretiendra avec eux.
Dans ces conditions, il me semble que la posture la plus performativement révolutionnaire consiste, pour chacun de nous, à ne produire un discours que sur les actions auxquelles il est vitalement acculé à consentir et, pour le reste, à observer le silence recueilli de ceux qui ont conscience de basculer dans l'inconnu.
Le même geste peut revêtir une signification très différente selon s'il est vécu ou s'il est représenté. Une femme qui acclame le routier sur le bord de la route, les pieds dans la neige et son enfant dans les bras, ne raconte pas la même histoire, ne vit pas la même chose, ne produit pas le même effet que la photo de cette scène diffusée sur les réseaux sociaux.
Ce n'est pas ce que nous disons qui importe, mais ce que cela implique dans nos corps et sur nos vies.
Commentaires
Enregistrer un commentaire